Optimiser la performance publique en collectivités territoriales : 7 leviers
Malgré les tensions budgétaires qu’elles subissent, les collectivités ont à leur disposition plusieurs leviers pour améliorer leurs performances. Elles doivent mettre en place une stratégie visant à lever des freins liés au manque d’effectif (difficultés à recruter, absentéisme), à la baisse de motivation, ou à la perte de compétences clés. Nous avons identifié 7 leviers fréquemment mis en œuvre pour améliorer durablement la performance publique.
Quelles problématiques freinent la performance dans la fonction publique territoriale ?
Ces dernières années, la problématique principale est le manque d’effectif lié à la perte d’attractivité du secteur public. Les collectivités peinent à convaincre les jeunes et les salariés du privé de rejoindre la fonction publique territoriale, particulièrement dans les métiers en tension. Le manque d’attractivité provient de plusieurs facteurs tels qu’un régime indemnitaire ne prenant pas toujours en compte les spécificités de certains métiers ou ne récompensant pas l’engagement (question plus particulière du CIA qui est rarement utilisé comme un levier managérial en la matière) ou encore la baisse des congés liée à la mise en place des 1 607 heures annuelles.
Un second problème est l’investissement des personnes présentes et le taux d’absentéisme, qui freinent la performance publique. Les sources de l’absentéisme se trouvent souvent dans la perte de sens au travail, qui mène à un manque global de motivation. Ce phénomène se fait particulièrement ressentir depuis la période du covid-19, qui a été un moment de remise en question de projet de vie pour nombre de personnes. En outre, l’absentéisme engendre de l’absentéisme compte tenu du report de charges sur ceux qui sont présents et qui finissent par s’arrêter par fatique ou démotivation (phénomène renforcé quand la présence et l’investissement ne sont pas valorisés).
Le sujet de la pénibilité au travail est aussi mal pris en compte. Certaines personnes se retrouvent en exemption médicale. Elles se rendent donc toujours sur leur lieu de travail, mais ne peuvent plus réaliser les mêmes tâches qu’auparavant. Ces personnes usées par leur métier difficile pourraient se réorienter. Pour cela, il faudrait créer des parcours professionnels (formation tout au long de la vie) permettant aux collaborateurs concernés de rebondir pour occuper un poste adapté à leurs aptitudes physiques et à leurs envies. Il s’agit cependant d’un sujet particulièrement complexe nécessitant du temps pour que les actions mises en place produisent leurs effets.
Enfin, le manque de performance publique est dû à une complexification de l’environnement. Les contraintes réglementaires sont de plus en plus fortes et en fréquentes évolutions, des normes qualité héritées du privée se sont peu à peu installées, sans pour autant remettre en question une organisation très marquée par la hiérarchie où la capacité de prise de décisions individuelles est limitée. Et dans le même temps, les agents du service public observent une hausse du niveau d’exigence de la part des usagers.
Comment mesurer la performance publique ?
La vocation première du service public est d’offrir un service de qualité aux usagers. On pourrait donc chercher à mesurer uniquement le ressenti des citoyens vis-à-vis de cette qualité de service. Mais aujourd’hui, c’est aussi la qualité de vie au travail qui est en jeu pour booster la motivation des agents. Il faut également noter que la culture de la performance n’étant pas encore présente dans le secteur public, des indicateurs sont rarement mis en place.
Pour évaluer la performance publique, on peut s’inspirer du domaine du Lean management, c’est-à-dire de l’amélioration continue. Selon ses principes, la performance se définit au regard du triptyque suivant :
- La satisfaction de la structure par l’atteinte des objectifs ;
- La satisfaction des usagers des services, ce qui peut s’évaluer via des enquêtes ;
- La satisfaction des collaborateurs qui se mesure via des indicateurs tels que le taux d’absentéisme (sous réserve d’en établir une cartographie précise) et des enquêtes sur la qualité de vie au travail (au sens large du terme c’est à dire comprenant la question de l’organisation du travail, la capacité à prendre des initiatives, à être concertés…).
7 leviers pour améliorer la performance publique
1. Adopter une stratégie claire
Le déploiement du projet de mandat au sein des services doit passer par la mise en place d’une stratégie de développement qui s’appuie sur une méthode projet. Il peut être nécessaire de sélectionner des objectifs, quitte à en mettre certains de côté. On met alors en place un plan stratégique afin de mener plusieurs projets en parallèle. Attention, mener trop de projets de front peut être source d’épuisement dans les services. Chacune des stratégies projet doit être communiquée auprès de l’ensemble des équipes, suivie et pilotée.
2. Remettre l’individu au cœur du dispositif
Dans certaines collectivités, la coopération et la mise en place de stratégies ne se développent qu’au niveau de l’encadrement. Or, il est essentiel d’inclure les agents dans la mise en place de nouvelles pratiques. Ce sont eux qui sont au plus près des problématiques du quotidien, ils sont donc à même d’identifier des difficultés et de proposer des solutions. De plus, des personnes consultées et écoutées se sentent considérées et gagnent en motivation.
3. Développer la compétence managériale des encadrants de proximité
Les encadrants de proximité, au contact des agents au quotidien, sont amenés à régler différents types de problématiques. Comme nous l’avions évoqué dans notre actualité sur la résistance au changement, les encadrants de proximité rencontrent fréquemment des difficultés en termes de management. L’accès à un poste managérial fait partie de l’évolution de carrière dans la fonction publique (en cas de réussite aux concours notamment) . Les encadrants peuvent cependant éprouver des difficultés à adopter une posture adéquate. Lorsque le management s’appuie sur une peur de perte de pouvoir sur son équipe (ce qui est souvent le cas quand le management participatif est préconisé), le dialogue devient difficile et la tendance est à l’hyper-contrôle et à l’autorité ou au contraire à la difficulté à prendre des décisions et à arbitrer. Les compétences en management peuvent être acquises via des échanges de pratiques et le codéveloppement (plus efficaces que la formation sur ce niveau managérial).
4. Définir et piloter une politique RH volontariste
La politique de ressources humaines a un rôle important à jouer pour remotiver les équipes. Elle doit agir sur plusieurs axes :
- Le développement des compétences via la formation afin de s’adapter aux évolutions des métiers et aux attentes accrues des usagers ; Elle est aussi une source d’épanouissement notamment pour les jeunes collaborateurs.
- La gestion de carrière afin de permettre aux personnes de changer de métier tout en restant dans la fonction publique, notamment lorsque la première partie de carrière s’est déroulée dans une activité à forte pénibilité ;
- De nouvelles méthodes de recrutement qui permettent d’attirer des personnes adaptées, compétentes et motivées sur les postes vacants.
- Une démarche d’amélioration de la qualité de vie au travail pour pallier les absences, les démissions et redonner du sens au travail.
- La mise en place d’une gestion RH basée sur la confiance et la capacité à collaborer entre tous les niveaux hiérarchiques (favoriser le management participatif, le droit à l’initiative, le droit à l’erreur, la possibilité de proposer des améliorations et même des innovations …).
Chrystel et Olivier, spécialistes du secteur public, nous partagent leur expérience : « Dans les communes dans lesquelles nous intervenons, nous rencontrons souvent des agents qui se trouvent en souffrance. Leurs demandes sont pourtant simples : ils attendent généralement de la reconnaissance, une charge de travail qui correspond au temps dont ils disposent et du matériel adapté. ».
5. Analyser les process pour plus d’efficience et de fluidité
Il s’agit notamment d’identifier et de réduire le nombre de tâches sans valeur ajoutée. Les processus sont rarement formalisés, ce qui ne permet pas de les améliorer. L’objectif est que chacun s’interroge sur la valeur ajoutée de son poste, sur ce qu’il peut améliorer dans son quotidien. On va alors chercher à développer une culture de l’amélioration continue au sein de la collectivité. Une fois la démarche d’amélioration continue ancrée dans les habitudes, elle peut s’appliquer à la résolution de nombreux problèmes rencontrés au quotidien, c’est alors que naît l’organisation apprenante, capable de gagner d’elle-même en efficacité. Ce type d’organisation nécessite un management adapté, offrant la possibilité de tester de nouvelles manières de faire à tous les niveaux.
6. Tirer profit des outils et des ressources disponibles
La transformation digitale qui s’opère dans les collectivités a permis de gagner en efficacité pour répondre aux demandes des usagers. La dématérialisation, mais aussi les outils back office, sont des leviers de performance publique qui donnent les moyens d’assurer le même niveau de service en effectifs réduits. De nouveaux outils comme le portail citoyen déportent une partie de l’activité sur le citoyen, qui effectue seul des démarches administratives.
Depuis le passage des collectivités aux 1 607 heures annuelles, de nombreuses heures de travail ont été dégagées pour les collectivités. Pour transformer des jours de congés en RTT, des agents ont vu leur temps de travail hebdomadaire augmenté, ce qui peut représenter jusqu’à 15 jours supplémentaires par personne. Si une partie de ce temps est réinvesti dans la qualité de vie au travail, il est aussi nécessaire de revoir les objectifs de ces personnes à la hausse afin de mettre à profit les jours de travail supplémentaires.
7. Favoriser la coopération avec d’autres structures
La coopération avec d’autres structures se fait tout d’abord au sein d’EPCI (Établissement Publics de Coopération Intercommunale). Grâce à des opérations de regroupement, les communes peuvent réduire leurs coûts en mutualisant des services, des investissements dans du matériel et la construction d’infrastructures. Elles mettent ainsi en place des politiques plus pérennes. La mutualisation naît aussi de la coopération avec la société civile.
Les associations, qui ont de l’expertise, font partie de réseaux et ont une capacité de mobilisation des personnes, sont plus à même de porter certains projets. Lorsqu’une collectivité territoriale choisit de déléguer des projets, elle peut gagner en performance, mais elle risque de perdre en maîtrise et de ne pas bénéficier de la reconnaissance des citoyens vis-à-vis des actions dont elle est à l’origine. Enfin, il est essentiel pour les collectivités territoriales de s’inspirer d’autres organisations. Elles ont donc tout intérêt à organiser des échanges sur les pratiques et à mener des recherches pour connaître les clés de succès d’autres organisations.
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